• Poudre d’étoiles sur une mer qui scintille. Qui n’a rêvé de rejoindre les dauphins à la nuit tombée? Que font-ils? Ou vont-ils? Leurs nuits sont-elles comme les nôtres? Du côté de la terre, la frise des cocotiers devient noire.

     


    L’eau des Caraïbes est tiède comme un ventre. C’est l’heure crépusculaire ou les dauphins finissent leur sieste. Ce sont des dauphins tursiops, ou nez-en-bouteille, ou grands souffleurs. Sublimes torpilles grises à la peau douce et frémissante, dont la figure au long nez s’illumine d’un sourire énigmatique.

    Les bébés dorment encore. Une cheffe une Matriarche une femelle dominante, fait onduler sa caudale puissante en tournant autour des autres individus de la troupe. Ils flottent juste sous la surface, invisible d’en-haut, le corps alangui.

    Ils s’enfoncent lentement  en fermant de façon réflexe leur unique narine, l’évent, puis donnent un coup de queue afin de remonter prendre une goulée d’air. Ils s’emplissent les poumons toutes les vingt ou trente secondes. L’énigme du sommeil et de la respiration des cétacés n’est pas résolue.

    Un dauphin qu’on endort avec des somnifères meurt noyé s’il n’est pas tenu en surface. Les anesthésiques chimiques perturbent le fonctionnement des centres cérébraux qui commandent les muscles de sa cage thoracique.

    Certains chercheurs pensent que la respiration des cétacés n’est que volontaire: théorie difficile à admettre. A moins que__ travaux récents, hypothèses à une confirmer, ces animaux ne recourent à une étonnante  » ruse » physiologique pour goûter les plaisirs de Morphée.

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  • L’aigle, reine des airs, avec Margot la pie,
    Différents d’humeur, de langage et d’esprit,
    Et d’habit,
    Traversaient un bout de prairie.
    Le hasard les assemble en un coin détourné.
    L’agace eut peur; mais l’aigle, ayant fort bien dîné,
    La rassure, et lui dit: Allons de compagnie:
    Si le maître des dieux assez souvent s’ennuie,
    Lui qui gouverne l’univers,
    J’en puis bien faire autant, moi qu’on sait qui le sers.
    Entretenez-moi donc, et sans cérémonie.
    Caquet-bon-bec alors de jaser au plus dru,
    Sur ceci, sur cela, sur tout. L’homme d’Horace,
    Disant le bien, le mal, à travers champs, n’eût su
    ce qu’en fait de babil y savait notre agace.
    Elle offre d’avertir de tout ce qui se passe,
    Sautant, allant de place en place,
    Bon espion, Dieu sait. Son offre ayant déplu,
    L’aigle lui dit tout en colère:
    Ne quittez point votre séjour,
    Caquet-bon-bec, ma mie: adieu, je n’ai que faire
    D’une babillarde à ma cour:
    C’est un fort méchant caractère.
    Margot ne demandait pas mieux.
    Jean de la Fontaine.
    ( Ce n’est pas ce qu’on croit que d’entrer chez les dieux
    cet honneur a souvent de mortelles angoisses.
    Rediseurs, espions, gens à l’air gracieux,
    Au coeur tout différent, s’y rendent odieux:
    Quoique ainsi que la pie il faille dans ces lieux
    Porter habit de deux paroisses.)

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  • Un  fanfaron, amateur de la chasse
    Venant de perdre un chien de bonne race
    Qu’il soupçonnait dans le corps d’un lion,
    Vit un berger: Enseigne-moi, de grâce,
    De mon voleur, lui dit-il, la maison;
    Que de ce pas je me fasse raison.
    Le berger dit :C’est vers cette montagne.
    En lui payant le tribut un mouton
    Par chaque mois, j’erre dans la campagne

    Comme il me plaît; et je suis au repos.
    Dans le moment qu’il tenait ces propos
    Le lion sort, et vient d’un pas agile.
    Le fanfaron aussitôt d’esquiver:
    O Jupiter, montre-moi quelque asile,
    S’écria-t-il, qui me puisse sauver!
    ( La vraie épreuve du courage
    N’est que dans le danger que l’on touche du doigt:
    Tel le cherchait, dit-il, qui, changeant de langage,
    S’enfuit aussitôt qu’il le voit.)
    Jean de la Fontaine.

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  • Un philosophe austère et né dans la Scythie,
    Se proposait de suivre une plus douce vie,
    Voyagea chez les Grecs, et vit en certains lieux
    Un sage assez semblable au vieillard de Virgile,
    Homme égalant les rois, homme approchant des dieux,
    Et, comme ces derniers, satisfait et tranquille.
    Son bonheur consistait aux beautés d’un jardin,
    Le Sythe l’y trouva qui, la serpe à la main,
    De ses arbres à fruit retranchait l’inutile,
    Ebranchait, émondait, ôtait ceci, cela,
    Corrigeant partout la nature,
    Excessive à payer ses soins avec usure.
    Le Scythe alors lui demanda
    Pourquoi cette ruine: était-il d’homme sage
    De mutiler ainsi ces pauvres habitants?
    Quittez-moi votre serpe, instrument de dommage:
    Laissez agir la faux du temps:
    Ils iront assez tôt border le noir rivage.
    J’ôte le superflu, dit l’autre; et l’abattant,
    Le reste en profite d’autant.
    Le Scythe, retourné dans sa triste demeure,
    Prend la serpe à son tour, coupe et taille à toute heure;
    Conseille à ses voisins, prescrit à ses amis
    Un universel abatis.
    Il ôte de chez lui les branches les plus belles,
    Il tronque son verger contre toute raison,
    Sans observer temps ni saison,
    Lunes ni vieilles ni nouvelles.
    Tout languit et tout meurt.
    Jean de la Fontaine.
    ( Ce Scythe exprime bien
    un indiscret stoïcien(2)
    Celui-ci retranche de l’âme
    Désirs et passions, le bon et le mauvais,
    Jusqu’aux plus innocents souhaits.
    Contre de telles gens, quand à moi, je réclame.
    ils ôtent à nos coeurs le principal ressort;
    Ils font cesser de vivre avant que l’on soit mort.
    (2) Les stoïciens s’efforçaient de faire mourir en eux tous
    les sentiments: ils affectaient une indifférence absolue pour
    ce qui n’était ni vice, ni vertu, sous prétexte de rendre
    l’homme sage, et lui ôtaient le coeur.)

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  • O Jupiter, qui sus de ton cerveau,
    Par un secret d’accouchement nouveau,
    Tirer Pallas, jadis mon ennemie,
    Entends ma plainte une fois en ta vie!
    Progné me vient enlever les morceaux;
    Caracolant, frisant l’air et les eaux,
    Elle me prend mes mouches à ma porte:
    Miennes je puis les dire; et mon réseau
    En serait plein sans ce maudit oiseau:
    Je l’ai tissu de manière assez forte.
    Ainsi, d’un discourt insolent,
    Se  plaignait l’araignée autrefois tapissière,
    et qui lors étant filandière
    Prétendait enlacer tout insecte volant.
    La soeur de Philomèle, attentive à sa proie,
    Malgré le bestion, happait mouches dans l’air
    Pour ses petits, pour elle, impitoyable joie,
    Que ses enfants gloutons, d’un bec toujours ouvert,
    D’un ton demi-formé, bégayante couvée,
    Demandaient par des encor mal entendus.
    La pauvre aragne n’ayant plus
    Que la tête et les pieds, artisans superflus,
    Se vit elle-même enlevée:
    L’hirondelle, en passant, emporta toile, et tout,
    Et l’animal pendant au bout.
    ( Jupin pour chaque état mit deux tables au monde:
    L’adroit, le vigilant et le fort sont assis
    A la première; et les petits
    Mangent leur reste à la seconde.)
    Jean de la Fontaine.

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  • L’oiseau vint dire à la poule:
     » Poule, tu as des ailes, pourquoi ne peux -tu pas prendre ton envol comme je le fais?
    -Parce que je n’en suis pas capable », répondit la poule.

    L’oiseau reprit:  » Pourquoi
    parler ainsi? Tu as des pattes, des ailes comme les miennes et tout ce qui est dans
    mon corps est aussi dans le tiens. »



    Lorsque la poule l’entendit, vexée, elle se fâcha

    et ne voulut plus écouter les paroles de l’oiseau:  » Va-t-en, dit-elle, coucher dans le désert,
    laisse moi dormir dans la maison; je n’apprécie pas le langage que tu m’as tenue.



    - Puisque tu ne veux pas entendre mes paroles, continua l’oiseau, demain les gens

    te prendront, te tueront et mangeront ta chair. Tu n’es pas intelligente: alors que je
    viens t’apprendre la sagesse, tu me repousses!


    Bientôt, lorsque tu verras les gens

    venir pour te tuer, peut-être alors m’écouteras-tu.
    - Va-t’en, je n’ai que faire de toi, répondit la poule.
    - Très bien, dit l’oiseau en partant se percher sur un arbre.



    Dès l’aurore, le maître de maison se leva et saisit un bâton pour tuer la poule.

    A sa vue, celle-ci prit son vol, traversa la maison de son maître en poussant des plaintes:
     » Ce que l’oiseau m’avait prédit hier est arrivé, alors que j’ai refusé de l’écouter! »


    L’oiseau

    toujours perché sur son arbre, dit à la poule:  » Entre dans les herbes. Si ton maître te voit,
    il te tuera.

    Quand tu seras au milieu de la verdure, ne bouge pas, reste tranquille. » Elle

    l’écouta et s’enfuit dans le fourré. L’homme chercha dans l’herbe après elle, sans succès.
    Fatigué, il rentra chez lui.


    En le voyant partir, la poule sortit des herbes pour rejoindre

    l’oiseau. Celui-ci lui donna de nouveaux conseils:  » S’il vient pour te tuer, pond un oeuf.
    Quand il  le verra, il pensera: la poule pond des oeufs, je ne la tuerai pas. Mais il prendra l’oeuf,
    s’en ira le faire cuire avec du sel, le mangera, et sera content.

    Chaque matin, il viendra chercher

    à l’endroit ou tu pondras ton oeuf. Voila le conseil que je te donne, ne l’oublie pas.
    - Je te remercie, mon frère, répondit la poule, je ferai ce que tu m’as recommandé,aujourd’hui,
    demain, jusqu’à ma mort.
    Je te remercie beaucoup. »

    L’oiseau ajouta:  » Si tu écoutes mes paroles, les gens n’auront plus envie de te tuer. »Puis il s’en alla
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  • Le pot de fer proposa
    Au pot de terre un voyage.
    Celui-ci s’en excusa,
    Disant qu’il ferait que sage
    De garder le coin du feu:
    Car il lui fallait si peu,
    Si peu, que la moindre chose
    De son débris serait cause:
    Il n’en reviendrais  morceau.
    Pour vous, dit-il, dont la peau
    Est plus dure que la mienne,
    Je ne vois rien qui vous tienne.
    Nous vous mettrons à couvert,
    Repartit le pot de fer:
    Si quelque matière dure
    Vous menace d’aventure,
    Entre deux je passerai,
    Et du coup vous sauverai.
    Cette offre le persuade.
    Pot de fer son camarade
    Se met droit à ses côtés.
    Mes gens s’en vont à trois pieds
    Clopin-Clopant, comme il peuvent,
    L’un contre l’autre jetés.
    Au moindre hoquet qu’ils treuvent.
    Le pot de terre en souffre; il n’eut pas fait cent pas
    que par son compagnon il fut mis en éclats,
    Sans qu’il eut lieu de se plaindre.
    Ne nous associons qu’avec nos égaux; ou bien
    il nous faudra craindre, le destin d’un de ces pots.
    Jean de la Fontaine

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