• Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie

    Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
    Ou perdre d’un seul coup le gain de cent parties
    Sans un geste et sans un soupir;
    Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
    Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre
    Et te sentant haï, sans haïr à ton tour,

    Pourtant lutter et te défendre;
    Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
    Travesties par des gueux pour exciter des sots,
    Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
    Sans mentir toi-même d’un seul mot;
    Si tu peux rester  digne en étant populaire,

    Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,
    Et si tu peux aimer tous tes amis en frères
    Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi;

    Si tu sais méditer, observer et connaître

    Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
    Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître, Penser sans n’être qu’un penseur;
    Si tu peux être dur sans jamais être en rage,

    Si tu peux être brave et jamais imprudent,
    Si tu sais être bon, si tu sais être sage
    Sans être moral ni pédant;
    Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
    Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
    Si tu peux conserver ton courage et ta tête
    Quand tous les autres les perdront,
    Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire

    Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,
    Tu seras un homme, mon fils. 
    Rudyard Kipling.1865-1936.

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  • Je sens un rythme en moi qui se détache
    De ce vacarme ou je vais sans chemin
    Et m’accordant au charme neuf, soudain
    J’accède à la clarté d’une terrasse,

    Ou quelque main me guide et vient tracer
    Limpide un ordre ou je puis me dépendre
    Du démon murmurant plus malicieux
    Que le silence pur sous la menace.

     

    Et se rejoignent maintenant à la surface
    Du mauvais songe les paroles résolues
    A s’éclairer lucides en un volume.
    Le son m’invente une effigie de chair.
    La forme redevient ma sauvegarde.
    Vers un soleil mes peines se consument

    (1893-1984).

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  • L’île sur le lac ( 1893).
    Que je me lève et je parte, que je parte pour Innisfree, Que je me bâtisse là une hutte, faite d’argile et de joncs, J’aurai neuf rang de haricots, j’aurai une ruche
    Et dans ma clairière je vivrai seul, dans le bruit des abeilles.
    Et là j’aurai quelque paix car goutte à goutte la paix retombe
    Des brumes du matin sur l’herbe ou le grillon chante,
    Et là minuit n’est qu’une lueur et midi un rayon pourpre Et d’ailes de passereaux déborde le ciel du soir.

     

    Que je me lève et je parte, car nuit et jour
    J’entends clapoter l’eau paisible contre la rive,
    Que je sois sur la grande route ou le pavé gris,
    Je l’entends au plus profond du coeur.
    W.Butler yeats.

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  • Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante;
    Elle sourit et se lamente,
    Et vous fuit et vous importune.
    La nuit, suivez-la sur la dune,
    Elle vous raille et vous tourmente;
    Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante.
    Et souvent elle se met une
    Nuée en manière de mante;
    Elle est absurde, elle est charmante;
    Il faut adorer sans rancune,
    Avec ses caprices, La Lune.
    ( Rondels).
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  • Clair de Lune.
    Votre âme est un paysage choisi
    Que vont charmant masques et bergamasques
    Jouant du luth et dansant et quasi
    Tristes sous leurs déguisements fantasques.Tout en chantant sur le mode mineur
    L’amour vainqueur et la vie opportune
    Ils n’ont pas l’air de croire à leur bonheur
    Et leur chanson se mêle au clair de lune,

     

    Au calme clair de lune triste et beau,
    Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
    Et sangloter d’extase les jets d’eau,
    Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres.
    ( Fêtes galantes 1869).
    Paul Verlaine.

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  • C’était par un beau jour du bleu septembre,  silencieux, sous un jeune prunier, entre mes bras comme un rêve tendre, je la tenais, la calme et pâle aimée.

    Par dessus nous, dans le beau ciel d’été, il y avait tout là-haut un nuage, toute blancheur, longuement je le vis, et, quand je le cherchai, il avait fui.
    Depuis ce jour, beaucoup, beaucoup de mois, avec tranquillité s’en sont allés. On a sans doute abattu les pruniers

     

    Et si tu viens à me dire : » Et l’aimée? » Je répondrai: » Je ne me souviens pas ».

    Bien sûr, je sais ce que tu as pensé, Mais son visage, il n’est plus rien pour moi, Ce que je sais, c’est que je l’embrassai.

     » Et ce baiser serait en quel oubli, Si n’avait pas été là ce nuage! Je me souviens et souviendrai de lui Toujours, de lui très blanc qui descendait.


    Les pruniers peut-être ont encor fleuri Et la femme en est au septième enfant, Mais ce nuage, lui, n’eut qu’un instant Et, quand je le cherchai, mourait au vent.

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  • Ne me racontez pas comme avant des balivernes, et ne vous attendez pas à des guirlandes de rire de moi.Comme un vin amer dans votre verre je me verserai j’irai alors me recueillir et je vous sourirai.
    Et les bijoux- la probité, l’honneur, ne me les sortez pas, n’allez pas m’embrouiller la vie.

     

    Je vais jouer avec la bague à mon doigt. Je n’irai pas vous appeler, et je n’irai pas vous chasser J’irai alors me recueillir et je vous sourirai.
    Mara Zalite, poète letton.

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